Déclaration de Beyrouth sur le Développement Durable (Rio+20)
« Pour une Gestion durable
de notre Territoire »
Du 28 au 29 novembre 2011, plus de 300
participants nationaux et méditerranéens représentant des administrations
gouvernementales chargées du Développement durable, de l'eau, des institutions
de coopération bi et multilatérales, de nombreux organismes représentant le
secteur public et privé du Liban, se sont réunis à l’ESA à Beyrouth (Liban),
afin de définir les actions concrètes les mieux appropriées pour la préparation
des assises de Rio+20 en 2012.
A
cet égard, au cours des vingt dernières années, le paysage socio-économique du
pays du Cèdre a connu des développements positifs mais non sur le plan
environnemental. Traiter la question de l'environnement au Liban sans prendre
en compte la problématique de l'eau et de l'assainissement, l'énergie,
l'aménagement des territoires, le développement économique et les progrès de la
société, notamment les préoccupations de solidarité et d'équité, la bonne
gouvernance ou la lutte contre la corruption, c’est en réalité créer des
obstacles qui sont autant de limites au développement, aux libertés et aux engagements
euro-méditerranéens. Une politique du développement durable pour le Liban implique
de bons diagnostics et des visions partagées entre les secteurs concernés. Cela
suppose l’élaboration d’une plateforme commune de communication entre les
différents secteurs socio-économiques du pays afin d'adopter un langage commun
loin des malentendus et des tensions. C’est une démarche de développement
durable qui repose sur quatre piliers incontournables :
-
La protection et la mise en valeur de l'environnement.
-
Le développement économique.
-
Les progrès de la société.
-
L'éthique.
Dès
lors, les Recommandations portent sur les axes suivants :
-
L’Eau.
-
L’Environnement.
-
L’Energie.
-
L’Économie.
L’Eau
L’accès
à l’assainissement sur la rive Sud-Est accuse un retard plus important par
rapport au système d’approvisionnement en eau potable. Les pays de cette rive
de la Méditerranée vont devoir se livrer à une concurrence accrue pour les
ressources restantes.
Une
prospective visant une gestion durable des ressources en eau par les pays de la
région et notamment pour le Liban nécessite tout d’abord de porter une plus
grande attention à la gestion de la demande et à l’amélioration de l’efficience
de l’eau. Les actions prioritaires doivent être réalisées dans le secteur
agricole, principal poste consommateur de ressources en eau dans la région (80%
dans les pays de la rive sud).
Cela
nécessite une rationalisation de l’emploi de l’eau pour l’irrigation en ayant
recours à des techniques d’irrigation plus économes (goutte à goutte, surtout
pour le maraîchage, ou l’aspersion pour les grandes cultures), une approche
plus rationnelle du choix des pratiques culturales, une meilleure sélection de
semences et de variétés plus résistantes au stress hydrique ainsi qu’une
meilleure protection des sols.
Des
actions similaires conviennent d’être également entreprises pour améliorer
l’efficience des réseaux d’eau potable, car on estime que les quantités d’eau
prélevées et perdues ou inutilisées représentent 40% de la demande en eau de la
région.
L’option
de l’exploitation de sources d’eau douce marines est aussi à prendre en compte.
Pour le Liban, l’exploitation de ressources non conventionnelles permettrait de
combler partiellement le déficit d’eau prévu pour 2040 (1095Mm3 contre 1660Mm3)
en mobilisant 565Mm3 de nouvelles masses d’eau. S’agissant du dessalement d’eau
de mer, très énergivore, ce procédé doit être effectué avec des énergies sobres
en carbone pour être considéré comme une véritable option de développement
durable.
Les
organisations des Nations-Unies et de l’Union européenne ainsi que l’Union pour
la Méditerranée (UPM) déploient des efforts considérables pour trouver des
solutions à ces conflits en espérant inverser la situation en faveur d’une
coopération régionale et consolider ainsi une paix permanente entre les pays
riverains. Les textes législatifs, tels que la nouvelle stratégie
méditerranéenne de l’eau (c’est celle de l’UPM actuellement en cours
d’adoption), la convention de l’ONU (1997), et la Directive cadre sur l’eau
(DCE) de l’Union européenne, pourraient constituer des outils importants et
fiables pour formuler des accords et traités entre les nations.
De
nouvelles méthodes d’irrigation (aspersion et goutte-à-goutte) et de
fertilisation doivent être appliquées pour une meilleure gestion de l’eau. Il
faudrait aussi s’employer à améliorer le rendement des réseaux d’irrigation et
adopter un système de contrôle qualité pour l’eau d’irrigation. Aussi faudrait-il
encourager la formation d’associations réunissant les utilisateurs des eaux
d’irrigation (AUEI).
En
outre, le principe du « pollueur-payeur » devrait être appliqué aux pays riverains
qui polluent les cours d’eau internationaux.
La
définition des stratégies de gestion des ressources naturelles et des
programmes de réhabilitation des sols et des cours d’eau dégradés est une
action prioritaire à entreprendre.
Également
indispensable, la constitution d’une banque de données régionales, fiables et
accessibles dont le premier apport serait de regrouper les données relatives
aux ressources en eau sur le plan quantitatif et qualitatif. Et pour compléter
tout ce qui précède, la création d’un Centre d’information et de formation aux
métiers de l’eau au Liban paraît plus que jamais nécessaire.
A ce niveau, le FFA tient à saluer le rôle de la FAO
(Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture) en
matière de sécurité alimentaire. En
effet, la FAO aide les pays en développement à combattre la faim en s’employant
à lutter contre la pauvreté et en faveur de la sécurité alimentaire, du développement
rural et de moyens d’existence durables.
L’Environnement
La question cruciale qui se pose est de savoir comment protéger
les ressources naturelles du Liban et appuyer les initiatives des ONG pour
l’application de l’agenda 21 adopté lors du Sommet de Rio en 1992. Dans
ce cadre, il faudrait bien gérer, protéger et développer nos forêts. Il
faudrait en effet les développer dans le cadre d’une règlementation et d’une
gestion pour une utilisation durable prenant en considération tant le
renouvellement de la forêt que les besoins de la population (les forêts au
Liban ont malheureusement perdu plus de 33% de leur surface en quarante ans).
Dans ce sens, nous recommandons la création d’un Office
national des Forêts dont la
mission serait de préserver et développer la santé des forêts nationales
(forêts et ressources forestières : bois, chasse, cueillette, etc.) ainsi
que leur diversité et leur productivité.
A ce niveau, le FFA tient à saluer l’action de la
coopération française au Liban dans le secteur de l’environnement.
Cette
action contribue au développement durable par la préservation des ressources
naturelles du Liban et la valorisation de ses biens publics mondiaux, plus
précisément la biodiversité des zones humides de Aamiq et de Tyr et la lutte contre
la pollution marine. Le FFA se félicite de l’appui qu’apporte le Fonds Français
pour l’Environnement Mondial (FFEM) à la protection du patrimoine forestier du
Liban et remercie aussi la coopération française pour sa contribution
significative à l’ajustement du cadre réglementaire et institutionnel à travers
la rédaction du code de l’environnement (adopté en 2002) et plus récemment la
rédaction puis la révision du code de l’eau dont l’approbation prochaine par
les autorités libanaises conduira à améliorer significativement les modes de
régulation du secteur de l’eau.
Le
FFA adhère totalement aux trois orientations à travers lesquelles la
coopération française poursuivra son soutien pour accompagner le Liban dans la
préservation de ses ressources naturelles et la promotion de son développement
durable, à savoir : l’amélioration de la
gouvernance institutionnelle, le
renforcement des infrastructures en matière d’assainissement et la promotion
des énergies renouvelables et des pratiques d’efficacité énergétique.
L’Energie
Pour
anticiper la hausse de la demande en énergie dans le sud, il est impératif de
développer des plans solaires (PSM initié pour l’Union pour la Méditerranée) et
éoliens nationaux très volontaristes, comprenant un volet financier et réglementaire
réaliste. En fait, le premier objectif recherché est d’assurer aux générations
futures un avenir moins dépendant des énergies fossiles. Dans cette
perspective, l’implantation d’une stratégie énergétique durable repose sur des
mesures importantes et courageuses.
Il
s’agit également de développer les trois piliers de la politique énergétique, à
savoir : un système effectif de sécurité d’approvisionnement, l’accès à
l’énergie garanti et l’arrêt des subventions pour les combustibles fossiles.
Il est
tout aussi important d’avoir une conception de plans d’urbanismes concertés et
à long terme avec des villes et bâtis plus denses et efficaces reliés par un
système fiable de transport collectif, ainsi que des centres de résidence, de
travail, de commerce et de loisirs rapprochés. Les municipalités ont un grand
rôle à jouer dans ce domaine puisqu’il leur incombe de disposer et de gérer les
déchets dans le territoire de la municipalité.
Concernant
ce secteur, on ne saurait assez recommander l’élaboration d’une politique de
rationalisation de l’utilisation de l’énergie.
L’Économie
Le pilier économique nous incite à économiser les
ressources non renouvelables ou rares dans le pays. D’où l’utilité de lancer
une première réflexion sur la thématique de l’économie verte et du secteur
privé. Il faudrait encourager les initiatives
des banques dans ce sens puisque plusieurs d’entre elles s’investissent dans
des actions concrètes sur le terrain par le développement de partenariats avec
des organisations non gouvernementales (ONG), ou encore via la sponsorisation,
le financement et l’exécution de projets. Aussi, la communication peut-elle être
optimisée comme « outil » au service de l’Environnement, menant à une
prise de conscience et une action responsables.
Pour
nos entreprises libanaises, le défi de l’environnement n’est pas des moindres
avec trois axes essentiels : comprendre les enjeux de
l’environnement, le cadre juridique libanais et les conséquences réelles que
comporte toute négligence dans le domaine, faire un bilan
détaillé de la dimension écologique que comporte l’activité de chaque
entreprise, définir les actions à prendre pour rendre
l’entreprise « conforme » aux exigences écologiques, en déterminer le
coût, et les mettre en place et enfin, intégrer la dimension écologique
dans les systèmes d’Audits interne et externe de l’entreprise pour
permettre une mise à niveau durable.
Pour
les entreprises industrielles, un plan de mesures est à engager, de la
modification des procédés de « production » à l’isolation des déchets
créés jusqu’au traitement, à la transformation ou l’élimination de ces déchets
dans des conditions « conformes » aux lois et réglementations en
vigueur.
L’éducation au Développement durable et le
rôle des universités
Notre
colloque doit pouvoir contribuer à une réflexion globale ayant pour objectif de
favoriser l’émergence de citoyens et d’entreprises responsables, c’est-à-dire
conscients de leur impact sur leur environnement et soucieux de l’optimiser.
Mais il s’agit aussi de sensibiliser les étudiants à la préservation de
l’environnement, de privilégier les relations avec des acteurs respectueux de
l’environnement, et de diminuer l’empreinte carbone des équipements de tout
genre.
L'empreinte écologique du Liban devrait
être calculée
L'empreinte
écologique décrit la relation entre, d’une part les demandes que nous exerçons sur
la nature et, d’autre part, les biens et services constituant « l’offre de
la terre ». Cette empreinte pour le territoire libanais n'a pas été à ce
jour calculée. Elle devrait donc faire l'objet d'un sujet de recherche pour évaluer
la consommation des Libanais par rapport aux limites de la biocapacité
naturelle de leur territoire.
Solidarité pour le développement durable au
Liban
La déclaration de Beyrouth sur le développement
durable, qui intervient en clôture des travaux de ce colloque, constituera donc
un document de référence pour la délégation libanaise au sommet de Rio+20 et
lui permettra de participer efficacement à ces débats.
De plus, à l’issue de ce colloque, un groupe permanent
d'échanges de réflexions et d'expériences devra être mis en place, avec des calendriers cohérents ainsi que des moyens appropriés
pour diffuser les bonnes pratiques en matière d’Environnement. Ceci, en nous appuyant sur les
organismes méditerranéens partenaires à cette manifestation : le Semide,
l'Académie de l'Éthique (France-Liban), la FAO, le Plan Bleu, le GWP-Med,
l'Ipemed, le Remob, l'AUF, l'OIE avec le soutien de l'UPM, l'UE et du
Gouvernement Français. Nos partenaires nous aideront à proposer des systèmes
d'évaluation afin de stimuler nos initiatives dans le but d'assurer une gestion
durable de notre territoire.
Les
participants sont convaincus que les réflexions approfondies, les octrois
pertinents proposés par les experts conduiront à présenter une stratégie
concrète afin que le Liban puisse se faire entendre.
La
réussite d'un développement durable passe avant tout par une éducation, un
enseignement et une solidarité commune, solidarité qui a pour but de faire
émerger une nouvelle génération libanaise et méditerranéenne, celle de « l'Eco-citoyen ».
Cette
déclaration comprendra d’autres recommandations ayant trait aux sujets qui
seront abordés dans le cadre de la deuxième édition qui sera préparée en
Janvier 2012.
Le Comité Scientifique
sous la direction de Dr Fadi Georges Comair
sous la direction de Dr Fadi Georges Comair
Président honoraire du REMOB
(Réseau Méditerranéen des Organismes de Bassin)
(Réseau Méditerranéen des Organismes de Bassin)
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