mercredi 14 mars 2018

Exposé de l'Ambassadeur du Maroc

Déjeuner-débat organisé par le FFA
Mercredi 7 Mars 2018 au Restaurant « le Maillon »
Sur le thème : L’apport de l’espace économique francophone au développement économique du Maroc.
Exposé préliminaire de SE Monsieur M’hammed GRINE
Ambassadeur du Royaume du Maroc au Liban


Excellences,

Mesdames et Messieurs,


Je voudrais de prime abord remercier la section du Liban du Forum Francophone des Affaires, et particulièrement sa Présidente Madame Reine CODSI, de m’avoir permis de venir aujourd’hui échanger avec vous au sujet de l’apport de l’espace francophone au développement économique du Maroc.

Le sujet étant très vaste et le temps qui m’est accordé étant très limité, je me contenterai de présenter les grandes lignes du thème proposé, en espérant revenir un peu plus en détails, au niveau du débat, sur les questions qui auraient le plus retenu votre intérêt.

Il y a tout d’abord à préciser que l’espace francophone est composé de quelques 84 pays et gouvernements dont 58 membres et 26 observateurs couvrant 4 continents, à savoir l’Europe, l’Afrique, l’Asie et l’Amérique et avec une population totale de plus de 900 millions d’habitants.

Le Maroc peut être présenté schématiquement comme étant au milieu de la plus grande concentration de pays francophones, c'est-à-dire l’Europe et l’Afrique. Il est à entre 2h30 et 3h de vol des capitales et des grandes villes de tous ces pays.

Le Maroc est l’intersection entre l’Europe, l’Afrique et le Moyen-Orient, avec une superficie totale de 740.000 km2 et 3.500 km de côtes sur l’océan atlantique et la méditerranée.

Le recensement général de la population en 2014 a arrêté le nombre d’habitants du Maroc a presque 34 millions, alors que le nombre des marocains résidants à l’étranger était estimé à 4,5 millions de personnes.

60% des habitants du Maroc vivaient en 2014 dans des villes, la pyramide des âges se présentait comme suit :

-       28% ont moins de 15 ans
-       63% ont 15 à 60 ans
-       9% ont plus de 60 ans

92% des marocains avaient en 2017 l’électricité, 73% l’eau courante et 72% étaient propriétaires de leur logement.

Le nombre total des marocains peut être estimé actuellement à 40 millions dont presque 35 millions vivant au Maroc et le reste à l’étranger.

Les échanges commerciaux du Maroc :

La structure des exportations marocaines de biens se présentait en 2017 comme suit :

1-     Automobile : 58,60Mds DH, 25%
2-     Agriculture et agro-alimentaire : 51,90 Mds DH, 22,4%
3-     Phosphates et dérivées : 44,00 Mds DH, 19%
4-     Textiles et cuir 37,50 Mds, 16%
5-     Aéronautique 11,10 Mds DH, 4,7%
6-     Electronique ; 9,10Mds DH, 3,88%
7-     Secteur pharmaceutique : 1,20 Mds DH, 0,5%

La structure des importations de biens se présentait comme suit : 

1-     Produits énergétiques : 69,5 Mds DH, 16%
2-     Produits finis de consommation : 101,7 Mds DH, 23%
3-     Biens d’équipement : 105,8 Mds DH, 24%
4-     Demi-produits : 95,0 Mds DH, 22%

A côté de cela, les services exportés s’élevaient à 162,60 Mds de DH contre 150,5 Mds importés ; alors que les recettes de voyages se sont élevées à 69,7 Mds DH contre 17 Mds DH.

Les transferts des marocains résidant à l’étranger ont atteint en 2017 le montant total de 65,4 Milliards de dirhams.

Après avoir donné ces quelques éléments et chiffres essentiels relatifs au Maroc, nous nous proposons d’appréhender l’importance de l’espace francophone dans le développement économique du Maroc, à travers les échanges commerciaux et autres de notre pays avec cet espace ; ainsi que les Investissements directs entre le Maroc et les pays de cet espace et ce, à travers trois axes : Maroc-France, Maroc-Afrique subsaharienne francophone et enfin Maroc-Maghreb.

Les relations entre le Maroc et la France

La France reste le premier partenaire économique et financier du Maroc, bien qu’au niveau des échanges, elle vient d’être dépassée par l’Espagne, tant au niveau des importations que des exportations. Le solde bilatéral des échanges entre les deux pays était en faveur de la France jusqu’en 2014, mais il devrait devenir en faveur du Maroc en 2015, considérant la dynamique des exportations automobiles du Maroc vers la France. L’émergence du secteur automobile marocain et plus généralement la montée en gamme des exportations marocaines, se reflètent dans les échanges avec la France.

Entre 2006 et 2015, les exportations du Maroc vers la France ont progressé en moyenne de 6,4% par an, plus vite que les importations du Royaume (1,7%).

Selon l’Ambassade de France au Maroc, ces évolutions s’expliquent, notamment, par :

- «L’ouverture croissante du Royaume, suscitant une plus forte concurrence. Celle-ci se matérialise par la signature de nombreux accords de libre-échange, en 1996 avec l’Union européenne et en 2004 avec la Turquie, les Etats-Unis et le groupe de pays Tunisie, Egypte, Jordanie (accord d’Agadir)».
- « Par ailleurs, on assiste, au Maroc comme partout, à la montée de la Chine, aujourd’hui troisième fournisseur du Royaume….La montée en gamme du Maroc, les importations marocaines s’orientant davantage, en matière industrielle, vers des pièces détachées, tandis que ses exportations sont de plus en plus tournées vers des produits à forte valeur ajoutée, tels l’automobile ».

Par ailleurs, la France préserve son rang de premier investisseur au Maroc (28,4% du total des IDE reçus par le Royaume en 2014). Avec 750 filiales d’entreprises françaises recensées, le Maroc est la première destination des investissements français sur le continent africain.

A noter que 34 des entreprises du CAC 40 sont présentes au Maroc.

La France est encore le premier pays d’accueil des Marocains résidant en Europe avec 1,3 million qui vivent dans l’Hexagone. Si les premières générations d’immigrés marocains étaient majoritairement des ouvriers, la génération actuelle appartient désormais à toutes les couches sociales.

A titre d’illustration, les marocains représentent 10% des médecins étrangers nés hors de France et exerçant dans les hôpitaux français, soit 5.800 médecins marocains (étude du conseil national de l’Ordre des médecins en France).

Les 35.000 étudiants marocains en France constituent le premier contingent des étudiants étrangers en France. Les établissements d’enseignement français au Maroc scolarisent 37.025 élèves (rentrée 2017).

51.000 Français sont installés au Maroc (inscrits aux consulats français en 2017) ce qui représente le plus grand nombre de Français dans un pays africain.

 Les Français forment traditionnellement le premier contingent de touristes au Maroc (en 2014 les Français ont atteint 34% du total des arrivées). 

 Les relations Maroc – Afrique subsaharienne francophone

Les relations entre le Maroc et l’Afrique subsaharienne francophone s’insèrent dans le cadre de la politique africaine du Royaume qui n’a cessé depuis son indépendance d’accorder une importance primordiale au développement de ses relations avec ses confrères en Afrique, à travers la consolidation de ses relations politiques et l’établissement de partenariats diversifiés et féconds.

Sous le règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, cette vocation africaine a pris une nouvelle dimension en s’inscrivant dans le cadre d’une vision de long terme qui s’appuie sur les vertus de la coopération Sud-Sud et sur l’impératif du développement humain, dans l’établissement de rapports économiques équitables justes et équilibrés.

Les différentes visites officielles et tournées royales effectuées dans une quinzaine de pays africains et les tournées royales en Afrique, témoignent de l’engagement sincère du Royaume du Maroc en faveur du continent. Un engagement qui embrasse désormais tous les domaines, qu’ils soient politiques, économiques, sociaux, culturels ou spirituels.

Le choix de l’ancrage africain pour notre pays participe d’une logique qui s’accorde avec les reconfigurations actuelles de l’économie mondiale caractérisées par le rattrapage économique des pays émergents et l’évolution vers un système mondial multipolaire où le continent africain est appelé à se positionner en tant que nouveau pôle mondial de croissance.

A cet égard, la stratégie économique développée par le Maroc en direction du continent africain, ambitionne d’ériger notre pays en hub régional, au service du co-développement dans les différents domaines clés pour notre avenir commun (la sécurité alimentaire, les infrastructures, la bancarisation et l’inclusion financière, les énergies renouvelables, la croissance verte…).

L'Afrique subsaharienne accueille 62,9% des investissements directs étrangers (IDE) marocains dans le monde, avec un pic de 88,2% enregistré en 2010. C'est le résultat d'une étude sur le bilan des relations Maroc-Afrique subsaharienne lors des quinze dernières années, publiée par l’OCP Policy Center (Centre d’études de l'Office Chérifien des Phosphates).

En Afrique subsaharienne, la présence marocaine est plus marquée dans le secteur bancaire qui occupe la première position avec une part de 41,6%, suivi par les télécommunications (35,9%), le holding (10,5%) et l’immobilier (6,4%), relève l’OCP Policy Center.

Plusieurs grandes banques marocaines ont en effet fait le choix d'investir sur le continent depuis quelques années. C'est le cas de la Banque Marocaine du Commerce Extérieur (BMCE Bank of Africa) implanté en Afrique de l’Ouest depuis le siècle dernier ; ainsi que «ATTIJARI-WAFA BANK», qui compte quelques centaines d'agences en Afrique.

Le groupe Banque Centrale Populaire (BCP), de son côté, est aussi très présent en Afrique, notamment en matière de bancarisation et d'inclusion financière, comme à Madagascar par exemple.

Du côté des entreprises de télécommunications, Maroc Télécom poursuit son ambition africaine avec dix filiales dans neuf pays d'Afrique subsaharienne.

Parmi les Etats africains ayant reçu le plus d'IDE du Maroc ces dernières années, les pays francophones arrivent en tête. Le Sénégal a occupé la première position en 2008 avec 65,6% des investissements marocains sur le continent. Au cours des années 2009, 2010 et 2013, le Mali est arrivé premier, avec respectivement 58,9%, 35,6% et 28% des IDE du Maroc en Afrique.

En 2011 et 2012, le Cameroun et la Côte d’Ivoire, avec une part de 55,2% et 55,9%, étaient les premiers pays de destination des flux d’IDE marocains en Afrique subsaharienne, ajoute la même source.

Depuis le début des années 2000, le Maroc a conclu avec l’Afrique subsaharienne quelques 1000 accords de coopération dans plusieurs domaines.

Le Maroc est le deuxième investisseur africain en Afrique derrière l'Afrique du sud, et le sixième plus grand investisseur africain dans le monde avec un stock d'IDE sortant de 4,5 milliards de dollars selon les chiffres de l'Office des Changes du Maroc.

 Les relations Maroc – Maghreb et Afrique du Nord

Les pays du Grand Maghreb, notamment la Tunisie, l’Algérie et la Mauritanie sont les mieux placés normalement pour avoir les meilleures relations économiques et commerciales avec le Maroc, en raison de la proximité géographique, linguistique, religieuse et culturelle ; ainsi que des liens de fraternité qui lient nos peuples ; d’autant plus que ces pays constituent en plus de la Libye une union régionale, à savoir l’Union du Maghreb Arabe (UMA).

Mais, depuis la récupération du Maroc, en 1975, de ses provinces sahariennes qui étaient occupées par l’Espagne et ce, grâce à une marche pacifique de 350.000 marocain(e)s qui sont allés libérer cette partie de leur territoire national, l’Algérie a soutenu un mouvement séparatiste qu’elle ne cesse de soutenir, matériellement et politiquement depuis 43 ans et en y mettant de gros moyens et avec le soutien au début de l’ex bloc soviétique.

Ce conflit artificiel autour du Sahara Marocain bloque toute avancée dans la construction du Grand Maghreb et freine le développement des relations économiques et commerciales, non seulement entre les pays du Maghreb, mais aussi entre eux et leurs partenaires, notamment euro-méditerranéens.

Le non-Maghreb a un coût économique énorme, tant pour ses pays que pour leurs partenaires, comme l’Union Européenne.

A titre d’illustration, l’ouverture des frontières terrestres entre le Maroc et l’Algérie qui sont fermées par cette dernière depuis plus de 20 ans, l’ouverture des frontières, à elle seule, apporterait une croissance de 2 à 3% du Produit Intérieur Brut (PIB) pour le Maroc et l’Algérie et un peu moins pour la Tunisie, ce qui représente, selon les experts, quelque cent mille nouveaux emplois pour les jeunes de nos pays.

C’est un exemple qui montre le niveau de gâchis sur le plan économique et social d’un conflit artificiel hérité de la période de la guerre froide.

Depuis 2004, le conseil de sécurité de l’ONU ne cesse d’appeler les parties et les pays de la région à continuer de coopérer pleinement avec l’ONU pour mettre fin à l’impasse actuelle et de progresser vers une solution politique qui mettrait fin à ce conflit. Une solution négociée, sous les auspices de l’ONU, et acceptée par toutes les parties.

Le Royaume du Maroc qui s’est engagé dans cette dynamique positive et constructive et pour répondre au souhait de l’ONU, a proposé une initiative de négociation d’un statut d’autonomie qui serait accordée à la région du Sahara, dans le cadre de la souveraineté du Royaume et son unité nationale.

L’initiative marocaine a été considérée par le Conseil de Sécurité comme étant « sérieuse, crédible et réaliste ».

Et pour terminer sur une note un peu optimiste, nous pouvons dire qu’avec une solution politique à ce conflit, les grands vainqueurs seraient tous les peuples frères de la région et la coopération entre leurs pays ; ainsi que leur développement économique et social.

Je vous remercie pour votre attention.

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