Résumé de l’intervention de M. Henri Guaino,
Conseiller spécial du Président de la République française
J’adresse au Liban le salut fraternel de la France. J’ai déjà participé au Forum Francophone des Affaires à l’occasion du Sommet de la Francophonie en 2002 car pour moi la Francophonie c’est aussi l’économie, la création de richesse.
Nous nous réunissons ici car ce qui se joue au Liban et au Moyen Orient est d’une importance capitale si nous voulons réussir à faire de la Méditerranée un foyer de paix et de civilisation, pas seulement pour la région mais pour le monde. Et parce qu’un choc des civilisations entre l’Occident et le monde arabo – musulman serait suicidaire.
Tous les défis sont liés, qu’ils soient économiques, écologiques ou culturels et si nous ne faisons rien à l’heure où la vielle lutte entre la barbarie et la civilisation reprend, la partie sera perdue. C’est ce que nous essayons de faire avec l’Union pour la Méditerranée.
La Méditerranée n’est pas un théâtre secondaire mais primordial et nous devons être capables de construire un monde méditerranéen qui ne doit pas être une ligne de fracture entre le Nord et le Sud. Ce monde où l’idée même de civilisation dans laquelle tous les hommes se reconnaissent a été fondée et qui fut le berceau du capitalisme a un rôle énorme à jouer dans l’avenir d’un capitalisme qui doit être plus responsable.
La Méditerranée ne doit pas être une économie entre deux mondes mais, comme au temps de la Renaissance, une économie monde telle que conceptualisée par Braudel.
La crise économique et financière que nous vivons doit nous conduire à remettre en question le modèle de pensée unique néolibéral qui est une impasse. Ce type de mondialisation a échoué et les peuples réclament plus d’intervention de l’Etat. L’aplatissement culturel et linguistique du monde est un appauvrissement.
Pour Porter, auteur américain du livre sur l’avantage concurrentiel des nations, celles-ci ne peuvent construire un tel avantage à travers l’imitation mais en mettant en valeur leurs propres atouts. Il faut exploiter ses talents propres, partir de ce qu’on est. Soit nous arriverons à concilier ouverture et diversité, soit nous favoriserons les crispations identitaires.
On a commis la faute de croire que tout était technique, que si tout le monde parlait la même langue on n’aurait pas de problème de communication. Or la Renaissance a été favorisée par le passage de la transmission du savoir à travers une langue unique, le latin, à une transmission par le biais de plusieurs langues, nécessitant un effort enrichissant de traduction et d’adaptation.
Même en économie tout n’est pas technique, comme en témoigne la dérive des marchés financiers et la folie du « flash trading » (cotation instantanée des valeurs), comme si la valeur réelle d’une entreprise pouvait varier d’une seconde à l’autre ! En confondant la richesse avec son signe on a perdu de vue que la finalité de l’économie n’est pas simplement le profit mais c'est l’homme. La politique économique ne se réduit pas à la science économique. Il nous faut donc redéfinir la mesure de la performance économique et la France a pris l’initiative de proposer la formation d’une commission d’experts internationaux ayant pour mission d’y réfléchir.
La crise que nous vivons n’est pas seulement technique. Il s’agit d’une crise de valeurs.
Dans ce contexte l’UPM est une porte ouverte vers un meilleur avenir. Il s’agit de faire travailler ensemble des peuples souvent antagonistes autour de projets concrets dans une vision entrepreneuriale. La crise de Gaza ayant perturbé le processus, certains ont proclamé son échec. Mais en définitive aucun pays ne s’en est retiré.
Parmi les projets à l’étude figure la création au Liban d’un centre Méditerranéen de la recherche scientifique.
L’UPM n’a pas seulement une mission économique et écologique, elle est aussi politique. De toute façon la question politique est là. Le président Sarkozy a pris l’initiative de proposer dans le cadre de l’UPM une réunion de tous le pays concernés pour discuter de la paix au Moyen-Orient dans un esprit de respect et pas sous la tutelle des grandes puissances.
Dans le combat pour l’idéal de la diversité défendu par l’UPM et la Francophonie le Liban est un exemple pour le monde entier. Exemplaire à cet égard est aussi la belle histoire de Léon l’Africain racontée par Amine Maalouf.
Ne nous y trompons pas, l’histoire du monde est entrain de basculer. La dictature des marchés est incompatible avec la démocratie. On est passé au bord du chaos et on ne peut pas continuer comme avant.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire